La science économique au service de la société

La dimension géographique de la politique d’entretien du réseau ferroviaire

Marc Gaudry et Émile Quinet

JPEG - 64.4 ko

De nombreuses études se sont penchées sur les coûts d’entretien des infrastructures ferroviaires, tant en France qu’à l’étranger. Elles visent toutes à estimer la fonction de coût correspondante à l’échelle d’un pays, mais très peu cherchent à estimer les différences qui pourraient se présenter à l’intérieur d’un pays en fonction de la localisation géographique - à l’exception d’études relatives aux pays scandinaves où est mis en évidence l’effet du climat.
Dans cet article, Marc Gaudry et Emile Quinet abordent ce problème pour le cas de la France. Ils s’appuient sur un modèle antérieur (1) expliquant conjointement le niveau de service offert par l’infrastructure ferroviaire nationale, son coût d’entretien et la fréquence de régénération des tronçons. Ils partent d’une variante de l’équation explicative des coûts d’entretien, observés par tronçon du réseau de 30 000 km (environ 700 tronçons), afin d’en explorer les « résidus » (2), c’est-à-dire la différence entre le coût par tronçon calculé par le modèle et le coût observé. Ils montrent d’abord que les résidus par tronçon sont significativement corrélés à l’intérieur d’une même région administrative de la SNCF (3), en introduisant une corrélation spatiale (4) identique pour toutes les régions. Cette prise en compte de la corrélation spatiale par l’ajout d’un seul paramètre augmente significativement la qualité de l’ajustement mais est sans effet sur les estimations des autres paramètres estimés dans cette équation de référence. L’ajout de variables supplémentaires (notamment climatiques) n’affaiblit pas la forte corrélation en question. Ensuite est étudié un raffinement de l’hypothèse d’une corrélation commune entre les régions en autorisant, pour 5 groupes de régions associés chacun à une grande gare parisienne, une corrélation interne spécifique à ce groupe et distincte de celle qui prévaut à l’intérieur des 4 autres groupes de régions : ceci revient à formuler à chaque fois un processus de corrélation spatiale d’ordre 2. D’autres hypothèses explicatives de la corrélation interne aux regroupements de régions SNCF, de type sociologique, sont aussi testées sans succès.
Les auteurs concluent à l’absence de corrélation interne entre résidus appartenant à deux groupes de régions (le Nord et l’Est), représentant chacun 15% des segments disponibles, et que l’effet France-entière précédent est imputable aux 70% des tronçons appartenant au reste du pays. Comme les frontières des deux groupements identifiés correspondent assez bien à ceux d’entreprises identifiables fusionnées en 1938, il apparait que des traditions comptables et/ou des modalités de gestion locales concernant l’inscription des travaux d’entretien des voies peuvent survivre longtemps à l’intérieur d’une firme en principe centralisée.
.........
(1) cf. PSE Working Paper N°2011-03, Version 21 du 27 février 2015.
(2) Il s’agit de la différence entre le montant de l’entretien expliqué par la régression calée sur l’ensemble national des tronçons et la dépense observée pour ces tronçons dans chacune des régions administratives. Les auteurs montrent que ces erreurs sont au hasard à l’intérieur de certains groupes de régions, mais pas de la majorité d’entre eux.
(3) Le territoire national est découpé en 23 régions.
(4) Corrélation spatiale signifie qu’une erreur peut être expliquée en partie par une ou plusieurs autres, voisines plus ou moins proches.
......................
Titre original de l’article académique : “Correlation within SNCF administrative regions among track segment maintenance cost equation residuals of a country-wide model”
Publié dans : PSE Working Paper N°2015-04
Téléchargement : https://medihal.archives-ouvertes.fr/PREPRINT/halshs-01112249v1
......................
© rochagneux - Fotolia.com