La science économique au service de la société

Optimisme, pessimisme et bulles financières

Bertrand Wigniolle

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Afin d’expliquer les mouvements importants des cours des actifs lors de ces dernières années, il a souvent été fait référence à des phénomènes de bulles financières : une augmentation des cours qui s’écartent fortement de la valeur fondamentale, suivie d’une chute brutale traduisant l’explosion de la bulle. Comment comprendre de tels mouvements des cours ? Les économistes ont fréquemment recourus à des interprétations basées sur l’irrationalité des acteurs : comportements moutonniers, vagues d’optimisme ou d’exubérance chez les investisseurs. En supposant au contraire les acteurs économiques comme rationnels, les articles de Jean Tirole en 1985 et de Philippe Weil en 1987 ont montré qu’il était possible de comprendre l’existence de bulles financières, mais que cette existence obéissait à des règles contraignantes. Plusieurs auteurs ont alors examiné si ces règles étaient vérifiées empiriquement, et ont souvent conclu négativement.
Dans cet article, Bertrand Wigniolle reprend les analyses de J. Tirole et P. Weil en utilisant une certaine forme d’affaiblissement de la rationalité des agents, inspirées par les nouvelles théories comportementales face à l’incertitude. La théorie utilisée est le modèle d’Utilité espérée Dépendant du Rang (RDU en anglais abrégé). Ce modèle permet de donner un sens précis à l’optimisme et au pessimisme des agents face à un monde risqué : un agent optimiste se comporte comme s’il surévaluait la probabilité des états favorables, et minorait la probabilité des états défavorables. Avec une telle représentation des comportements, est-il possible de comprendre l’existence de bulles ? Le pessimisme ou l’optimisme sont-ils favorables ou défavorables ? L’auteur montre que l’influence du pessimisme et de l’optimisme dépend du rôle que joue l’actif sur lequel porte la bulle financière dans le portefeuille des agents. Si les agents investissent dans cet actif pour se couvrir contre un choc négatif, le pessimisme accroît la possibilité d’existence de bulle. En revanche, si l’investissement est lié à un comportement très spéculatif, l’optimisme est favorable à l’émergence d’une bulle. Enfin, il est possible que l’optimisme entraine un phénomène d’ « indétermination de l’équilibre », dans lequel la valeur de l’actif échappe aux fondamentaux de l’économie pour être guidée par les anticipations auto réalisatrices des agents.
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Titre original de l’article académique : Optimism, pessimism and financial bubbles
Publié dans : Journal of Economic Dynamics and Control, Volume 41, Pages 188–208 - Avril 2014
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