La science économique au service de la société

L’influence des pairs dans la prévention du paludisme

Bénédicte H. Apouey et Gabriel Picone

JPEG - 57.1 ko

Le paludisme a causé 660 000 décès en 2010, et 80% d’entre eux sont survenus dans seulement 14 pays d’Afrique subsaharienne, selon l’Organisation Mondiale de la Santé. Les enfants de moins de 5 ans et les femmes enceintes sont particulièrement touchés par ce fléau, du fait de leur faible niveau d’immunité. Cependant, il existe des moyens de prévention efficaces, parmi lesquels on compte l’utilisation de moustiquaires (imprégnées d’insecticide) et la prise d’un traitement intermittent pendant la grossesse.
Dans cet article, Bénédicte H. Apouey et Gabriel Picone se concentrent sur les populations vulnérables des jeunes enfants et des femmes enceintes d’Afrique subsaharienne. Ils examinent s’il existe des effets d’influence entre individus, lors de la décision de se protéger du paludisme. Il s’agit de savoir si l’utilisation de moyens de prévention par un individu est influencée par leur utilisation parmi les « voisins » de cet individu, les voisins étant définis comme les individus vivant dans la même zone que l’individu. En présence de forts effets d’influence, les politiques de distribution de moustiquaires et de promotion des traitements seraient plus efficaces, parce que les bonnes pratiques de prévention se répandraient plus vite au sein de la population. L’analyse fait appel aux données des « Demographic and Health Surveys » et des « Multiple Indicator Cluster Surveys » pour 29 pays entre 1999 et 2012. La méthode employée consiste à calculer des multiplicateurs sociaux, qui permettent de comparer l’effet d’un facteur à un niveau individuel et à un niveau social.
Les auteurs concluent à la présence d’interactions sociales dans la prévention du paludisme, liées aux facteurs d’éducation et de richesse des individus. Les interactions sont fortes en ce qui concerne la prise de traitements par les femmes enceintes, et plus faibles pour l’utilisation de moustiquaires chez les jeunes enfants.
Ces conclusions sont conformes aux attentes, dans la mesure où la prise de traitement, qui implique de se rendre dans un centre de santé, est un phénomène avec une forte dimension sociale en Afrique subsaharienne, alors que l’utilisation de moustiquaires relève davantage de la sphère privée. Au final, ces résultats confirmant l’existence d’interactions sociales dans les attitudes de prévention sont encourageants pour l’action publique de lutte contre le paludisme.
......................
Titre original de l’article académique : “Social Interactions and Malaria Preventive Behaviors in Sub-Saharan Africa”
Publié dans : Health Economics, volume 23, issue 9, pages 994-1012
Téléchargement : http://halshs.archives-ouvertes.fr/halshs-00940084
......................
© auimeesri - Fotolia.com