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Les effets de la formalisation des droits fonciers sur la scolarisation des enfants éthiopiens

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Heather Congdon Fors, Kenneth Houngbedji et Annika Lindskog

Pour accroître la productivité agricole et favoriser la sécurité alimentaire, plusieurs pays d’Afrique sub-saharienne ont lancé des programmes visant à « formaliser » les droits fonciers en milieu rural. Cette formalisation consiste, entre autres, à émettre des documents officiels reconnaissant les droits informels d’usage de la terre détenus par les ménages. Cette démarche de formalisation des droits fonciers jusqu’alors implicites, est adoptée dans le but de réduire le risque d’expropriation, d’encourager l’investissement et de faciliter les transferts de droits fonciers entre individus. En effet, en milieu rural, la terre est souvent le principal capital des ménages : les questions foncières prennent une part plus importante dans la vie des individus et influencent ainsi plusieurs sphères de décision.

Dans cet article, Heather Congdon Fors, Kenneth Houngbedji et Annika Lindskog étudient l’effet de la formalisation des droits fonciers sur l’éducation et le travail des enfants dans la région d’Amhara en Éthiopie. Ils analysent que la formalisation des droits fonciers facilite le transfert de la terre d’une génération à l’autre. Etant donné le désir des ménages de maintenir le contrôle de la terre au sein de la famille, la plus grande facilité de transfert de la terre des parents au fils aîné induit un arbitrage entre apprentissage des travaux champêtres et temps d’étude pour les aînés. Si cet arbitrage réduit le temps d’étude – ou de loisir – des fils aînés, il pourrait aussi inciter les parents à considérer la scolarisation comme une option pour les autres enfants. Ce modèle prédit donc que l’impact de la formalisation des droits fonciers sur le niveau d’éducation devrait varier en fonction du rang de naissance des enfants. Pour tester cette hypothèse, les auteurs comparent les profils de scolarisation des enfants avant et après les opérations de formalisation des droits d’usage de la terre. Ils trouvent que la probabilité qu’un enfant soit scolarisé augmente avec l’enregistrement des droits fonciers. Toutefois, les fils aînés, et dans certains cas les filles aînées, peinent à progresser d’une classe à l’autre. La faible performance scolaire de ces derniers soulève par exemple la question du retour à l’école des enfants qui étaient déscolarisés et du soutien scolaire pour les enfants qui sont par ailleurs prédestinés à hériter de l’entreprise familiale. Dans le cas éthiopien, il serait intéressant de tester si un couplage des programmes de formalisation et d’un programme de soutien scolaire favoriserait l’apprentissage scolaire de tous les enfants, indépendamment de leur rang de naissance.

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Titre original de l’article académique : “Land Certification and Schooling in Rural Ethiopia”
Publié dans : PSE Working Papers n° 2015-30. 2015
Téléchargement : https://hal-pse.archives-ouvertes.fr/halshs-01202695v1

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