La science économique au service de la société

Qui finance la consommation des jeunes et des seniors ?

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Hippolyte d’Albis, Carole Bonnet, Xavier Chojnicki, Najat El Mekkaoui, Angela Greulich, Jérôme Hubert et Julien Navaux

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Le cycle de vie se décompose en trois moments principaux : la jeunesse, l’âge adulte et la vieillesse. D’un point de vue économique, ces trois périodes se caractérisent fondamentalement par l’écart entre les revenus et la consommation. A l’âge adulte, les revenus sont en moyenne supérieurs à la consommation tandis qu’ils sont inférieurs chez ceux qui ne travaillent pas, les plus jeunes et les plus âgés. La consommation de ces derniers est donc financée par un ensemble de transferts entre les générations dont l’importance économique est considérable. Ces transferts peuvent être d’ordre privé ou familial, typiquement entre parents et enfants vivant sous le même toit, mais peuvent aussi être socialisés par la puissance publique, avec par exemple un système de retraite par répartition, ou par le marché, via l’épargne privée. Le poids respectif de ces différents types de transferts nous éclaire sur le fonctionnement d’une société en révélant l’importance relative de la famille, de l’Etat et de l’individu.
Les auteurs de cet article participent en tant qu’équipe française au projet international des Comptes de Transferts Nationaux qui vise à développer une comptabilité par âge de l’ensemble des variables économiques, cohérente avec les Comptes nationaux et comparable d’un pays à l’autre. Ce projet, né à l’université de Berkeley dans les années 1990 compte aujourd’hui plus de soixante équipes nationales. L’équipe française a réalisé une décomposition par âge de près de 90 variables économiques sur une base annuelle entre 1979 et 2011 en utilisant plusieurs enquêtes publiques et les Comptes Nationaux. A partir de ces données, les auteurs ont reconstitué l’ensemble des transferts entre les générations et évalué les parts de la consommation à chaque âge financée respectivement par l’individu lui-même, par des transferts publics, et par des transferts familiaux.

Les résultats sont les suivants : depuis 30 ans, les jeunes dépendent de plus en plus des transferts intergénérationnels tandis que les seniors le sont de moins en moins. Plus précisément, en 2011, la consommation des moins de 25 ans était financée à 45% par des transferts publics et à 36% par des transferts familiaux. Ces parts ont fortement augmenté depuis 1979, où elles représentaient respectivement 32% et 30%. A l’inverse, la part de la consommation des plus de 60 ans financée par des transferts publics n’a fait que diminuer, passant de 68% en 1979 à 61% en 2011.

La comparaison avec un pays comme la Suède est éclairante : les jeunes y ont une proportion moindre de leur consommation qui est financée par transferts publics tandis que les séniors bénéficient d’une proportion supérieure. Ces résultats mettent à mal le cliché selon lequel la France sacrifie sa jeunesse au profit de ses séniors.

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Titre original de l’article académique : Who pays for the consumption of young and old ?” Hippolyte d’Albis, Carole Bonnet, Xavier Chojnicki, Najat El Mekkaoui, Angela Greulich, Jérôme Hubert, Julien Navaux

Publié dans : PSE Working Papers n°2018-23. 2018. A paraître dans Population and Development Review

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