La science économique au service de la société

L’effet de l’immigration sur les finances publiques des pays de l’OCDE

Lien court permanent vers cette page : https://bit.ly/2GzTT3k

Hippolyte d’Albis, Ekrame Boubtane, Dramane Coulibaly

Les 19 principaux pays de l’OCDE accueillent aujourd’hui plus de 45% de l’ensemble des personnes immigrées dans le monde. Par ailleurs, la part de ces personnes immigrées dans la population de ces pays est passée de 7% en 1990 à 13% en 2017, et pourrait continuer à croître du fait de la pression démographique dans les pays du Sud. Parmi les inquiétudes économiques que cet accroissement suscite, l’effet sur les finances publiques apparaît comme prédominant dans les enquêtes d’opinion, et notamment devant l’effet sur l’emploi des nationaux. Le sentiment qui prévaut est que les immigrés représentent une charge pour les économies des pays d’accueil.

Hippolyte d’Albis, Ekrame Boubtane et Dramane Coulibaly ont évalué les effets causaux des flux migratoires sur le revenu moyen, le taux de chômage et le solde des finances publiques en utilisant des données relatives aux 19 principaux pays de l’OCDE entre 1980 et 2015. Ils ont adapté des méthodes d’évaluation des politiques macroéconomiques aux questions migratoires afin d’identifier les effets de la migration sur les variables économiques et fiscales tout en tenant compte des interactions entre l’ensemble des variables et, notamment, des effets que les économies considérées pourrait engendrer sur les flux migratoires via, par exemple, la générosité de leurs systèmes de protection sociale.

Contrairement à l’impression d’une partie de la population, les estimations présentées dans l’article révèlent que les flux migratoires ont eu des effets économiques globalement bénéfiques sur l’économie des pays d’accueil : ils accroissent le revenu moyen, diminuent le taux de chômage et améliorent le solde des finances publiques. Les auteurs expliquent ces résultats en mettant en avant un dividende démographique engendré par la migration ; en effet, les flux migratoires conduisent à un accroissement de la part des personnes d’âge actif dans la population qui produit une série de conséquences économiques et fiscales favorables. Au niveau de la production, le taux d’emploi s’améliore, ce qui induit une augmentation du Produit Intérieur Brut par habitant. Cet effet est d’autant plus fort que la population du pays d’accueil est âgée. En ce qui concerne les finances publiques, la modification de la structure par âge de la population occasionnée par la migration entraîne une baisse des transferts publics par habitant. Certaines dépenses publiques augmentent, et notamment celles liées à la famille et à l’enfance, tandis que d’autres diminuent, et en particulier celles liées aux retraites et aux dépenses affectées aux plus âgés. L’un dans l’autre, l’effet est positif et le solde des finances publiques s’améliore avec la migration. Fait important, les bénéfices sont observables dès l’année de l’accroissement des flux migratoires.

En conclusion, s’il est vrai que la migration internationale est au cœur de multiples enjeux sociaux, culturels et géographiques et qu’elle est la source d’épineux problèmes diplomatiques, il n’en reste pas moins que ces derniers seraient en partie allégés si l’on parvenait à se débarrasser de l’idée reçue assimilant les migrants à un fardeau économique.

..................

Titre original de l’article : « Immigration and public finances in OECD countries »

Publié dans : Journal of Economic Dynamics & Control 99 (2019) 116–151

Disponible à : https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0165188918303920?via%3Dihub