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Les déterminants des rendements souverains : le rôle des déséquilibres budgétaires et extérieurs

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Mélika Ben Salem et Barbara Castelletti-Font

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Pendant la crise financière de 2009, les primes de risque souverain, c’est-à-dire les écarts sur les rendements des dettes publiques, ont divergé de manière significative entre les pays développés. Bien que le risque perçu pour « les pays au cœur de la zone Euro », comme l’Allemagne et la France par exemple, reste relativement faible, les marchés financiers semblent discriminer les économies périphériques, qui voient augmenter les primes au-delà de ce que justifieraient les seuls facteurs budgétaires.

Dans cet article, Mélika Ben Salem et Barbara Castelletti-Font prennent comme hypothèse que la montée des taux d’intérêt souverains dans les pays périphériques n’est pas seulement le résultat d’une fragilité budgétaire, mais de la combinaison de déséquilibres internes et externes significatifs. En effet, au cours de la dernière décennie, on observe une augmentation significative et relativement généralisée de la dette publique dans les pays de la zone Euro. Cependant, les économies périphériques, caractérisées par une détérioration très forte et rapide de leurs déséquilibres extérieurs, augmentent considérablement leur prime de risque de défaut au-delà de ce qui est constaté dans les pays au cœur de la zone.
Les auteurs évaluent la dynamique jointe des rendements souverains et de leurs déterminants de long terme dans 22 pays de l’OCDE, de 1980 à 2013, à l’aide de modèles économétriques. Ces derniers permettent de distinguer l’effet de l’augmentation de la dette publique sur les taux souverains selon deux cas distincts : un cas dans lequel la compétitivité du pays est fortement dégradée, et un autre dans lequel la compétitivité se maintient à un niveau considéré comme relativement « normal » par les investisseurs. La Commission Européenne, dans cet ordre d’idées, a mis en place une procédure concernant les déséquilibres macroéconomiques (MIP) qui vise à les prévenir et à les corriger à l’aide d’un tableau de bord incluant 11 indicateurs ; s’y trouvent également leurs valeurs limites au-delà desquelles les pays font l’objet d’une surveillance accrue. Parmi ces indicateurs, il y a à la fois la dette publique et la position extérieure nette. Les résultats mis en avant par les différentes estimations des auteurs indiquent l’existence d’un « double déficit », à la fois des comptes publics et externes, qui a exercé une pression à la hausse sur les rendements souverains dans les économies périphériques de la zone euro. En revanche, les pays au cœur de la zone bénéficient d’un effet « fuite vers la qualité », qui permet de maintenir leurs taux souverains à des niveaux plus faibles. Par ailleurs, les simulations en échantillon et hors-échantillon indiquent que, si les déséquilibres fiscaux des pays européens de la périphérie jouent un rôle clé dans la dynamique des taux longs, l’explication de leur hausse notable post-2008 prend nécessairement en compte le rôle joué par la dette externe. Cette dernière a en effet contribué de manière significative à la révision des anticipations des acteurs financiers. Ainsi, l’amélioration de la compétitivité pourrait jouer un rôle positif dans la soutenabilité de la dette publique.

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Titre original de l’article académique : “Which combination of fiscal and external imbalances to determine the long-run dynamics of sovereign bond yields ?”
Publié dans : Banque de France working paper n°606
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